Istanbul'a gider iken, alde da bir yagmur
Cette chanson bien plus vieille que moi, un classique revisité par maintes versions, qui ramène à une époque où cette ville était une ville, non une mégalopôle, de cinq millions d'habitants certes mais pas vingt - cette époque que je n'ai pas connue, cette ville que je n'aurais jamais vue.
Cette chanson je l'ai entendue maintes fois au Babel mon ex-bar bastion entre autres, sans me demander si je l'aimais ou pas - elle et son air entêtant, répétitif, au violon et pourtant discrètement oriental, et sa mélancolie gentiment surannée. Mais depuis trois jours elle tourne en boucle sous mon crâne, et déjà je sais que ce sera Istanbul, ma mélodie proustienne de Verneuil à moi. De fait, ma version est déjà personnelle, puisqu'elle commence en réalité par Uskudar - sauf que les deux premières phrases, que j'ai appris à chanter tant bien que mal avec l'aide d'Aytug - oui, Colloc 1, que je peux désormais nommer puisque c'est fini - définissent tellement mon séjour ici que je la garde comme ça voilà.
Dès que je mets les pieds à Istanbul, la pluie se met à tomber...
N'aurais-je donc connu que cela d'Istanbul ?
J'aimerais pouvoir commencer par le commencement, même alors que c'est une fin que je rédige - et qu'elle n'est pas plus facile à tracer, dans mon journal d'exil ou sur ce blog d'expat agonisant, que nombre d'autres choses en cette année.
Et puis zut, je n'ai pas envie de me forcer, trop de choses à faire et à penser, aussi une fois de plus je me réfugierai dans la poésie - il faudra reconnaître ça à cette ville, cette ville et moi, j'y ai écrit de la poésie - ou tout simplement j'y ai écrit.
Istanbul'da bilmiyorum
Istanbul j'aurais presque pu t'aimer
C'est toute l'histoire de nos rapports
Comme un rendez-vous décalé encore
Coït fini avant de commencer
Je n'aurai rien compris à Istanbul
Au bout d'un an cet unique bilan
Charme de ton sol montant descendant
Sans parler des vingt millions qui le foulent
Le cri de tes mouettes au petit matin
Vent du Bosphore chats dans les recoins
Sel de l'Ayran sucre du tahinli
Me manqueras-tu perle défraîche
Et tes mets que je n'ai su digérer
Je n'ai rien compris est-ce ça aimer
Zümre - Bahçesehir - 23 mayis 2017